Comment relever le défi de l’attractivité dans la fonction publique territoriale ? Entretien avec Yohann Nédélec
Yohann Nédélec, Président du Centre national de la fonction publique territoriale et du Centre de gestion du Finistère, nous présente les actions menées par la fonction publique territoriale pour attirer, recruter et fidéliser des talents. Un enjeu de taille pour les collectivités.
Il évoque également les actions bretonnes et finistériennes menées pour mieux faire connaître les 250 métiers qui composent la territoriale. Entretien.
Yohann Nédélec, Président du CNFPT et du CDG du Finistère
Source : CNFPT, 2024
Que recouvre la fonction publique territoriale ?
La fonction publique territoriale (FPT) regroupe les personnels des collectivités territoriales (communes, Départements, Régions), des structures intercommunales (communautés d’agglomérations, communautés de communes…), des établissements publics locaux et des offices publics d’HLM.
Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) quant à lui, est un établissement public paritaire déconcentré dont les missions de formation et d’emploi concourent à l’accompagnement des collectivités territoriales et de leurs agents dans leur mission de service public. Il a quatre missions principales : la formation, l’observation, l’organisation des concours et la scolarité des cadres d’emplois A+, et l’apprentissage.
Quels sont les métiers les plus recherchés en Bretagne ? Pourquoi les collectivités peinent-elles à recruter ?
Les métiers les plus recherchés sont en catégorie C avec plus de 50 % d’offres d’emploi qui ont été diffusées, en 2023, en Bretagne, comme chargé.e de propreté des locaux, assistant.e de gestion administrative, aide-soignant.e… De nombreux efforts sont aujourd’hui faits pour recruter plus largement et vers des profils différents.
La fonction publique territoriale, en Bretagne comme ailleurs, connaît des problématiques de recrutement en raison de la méconnaissance des métiers proposés, de la faible rémunération et d’un certain dénigrement des fonctionnaires. De plus, la FPT a une spécificité : elle est plus vieillissante, avec des départs en retraite qui ont déjà commencé et qui seront massifs d’ici à 2030.
Elle jouit aujourd’hui d’une image qui ne lui rend pas honneur malgré ses dix filières et près de 250 métiers et reste assez méconnue. Ses voies d’accès peuvent paraître floues et ne sont pas obligatoirement maîtrisées, même par certains collaborateurs du service public de l’emploi.
Le défi premier d’une fonction publique moderne est celui de l’attractivité, de la fidélisation et de la compétence. C’est le défi du CNFPT qui souhaite continuer à s’affirmer comme le garant de carrières dynamiques pour tous les agents territoriaux, d’assurer la montée en compétence et l’adaptation aux transitions et enfin, assumer pleinement un rôle d’école de la deuxième chance et d’ascenseur social, pour lutter contre l’assignation à résidence. C’est une des valeurs essentielles de la République, et elle fonde en grande partie mon engagement politique.
Faut-il rénover l’accès à la fonction publique, notamment par la modernisation les épreuves de concours ?
Oui, nous devons moderniser l’accès à la fonction publique pour garantir à la fois une plus grande attractivité, mais aussi attirer les meilleurs et permettre de recruter des profils différents ! Il faut changer les épreuves pour les rendre à la fois plus proches des pratiques professionnelles et ainsi mieux les ouvrir à la pluralité des parcours universitaires.
Le concours est un donc un vrai sujet, mais ne doit pas masquer le manque d’attractivité du secteur public local (nous avons également du mal à recruter des contractuels). C’est donc sur plusieurs leviers qu’il est impératif d’agir, et en premier lieu, celui de la rémunération après près de 20 ans de stagnation du point d’indice. Je tiens toutefois à souligner que nous avons un grand avantage : nous sommes porteurs de sens, au service de la communauté et de l’intérêt général.
Il faut par ailleurs prévoir une voie de concours spécifique en sortie d’apprentissage, pour que les apprentis formés dans le public cessent de partir dans le privé.
Qu’est-ce que la « marque employeur », citée par un rapport du Sénat comme un levier pour aider les collectivités à recruter ?
Cette marque employeur « Choisir le service public » découle d’un partenariat avec l’État et différents employeurs. Elle a pour objectif de renforcer la connaissance commune des actions des employeurs territoriaux et de l’État, tant au niveau national que territorial. Notre objectif est de travailler collectivement à l’attractivité de la fonction publique, de favoriser la visibilité des offres d’emploi, des métiers et des employeurs publics ainsi que de susciter et accompagner toute initiative conjointe de nature à développer la mobilité et les parcours entre employeurs publics. Nous avons également développé, en propre avec la Fédération nationale des Centres de gestion (FNCDG), le site metiersterritoriaux.fr pour attirer des profils différents qui ont toute leur place dans cette fonction publique territoriale.
Quelles actions mène le Centre de gestion du Finistère pour faire connaître la fonction publique territoriale ?
Afin de développer l’attractivité, le Centre de gestion du Finistère agit sur plusieurs plans.
Au titre de la coopération, la marque employeur DEN.bzh a vu le jour en janvier 2023. Son objet est de dynamiser le recrutement des collectivités locales par le biais d’une campagne disruptive qui cherche à casser les codes et les a priori sur la fonction publique territoriale bretonne.
Le CDG 29 participe par ailleurs à un grand nombre d’évènements tel que le Forum de l’emploi public breton en partenariat avec le CNFPT et les CDG bretons, mais également l’opération « Les collectivités se dévoilent », période de mise en valeur, dans les collectivités, de la diversité et de la richesse des emplois de la territoriale.
Entretien réalisé en août 2024 par le GREF Bretagne