Egalité professionnelle. Se former à l’oralité pour mieux s’affirmer et négocier
Écoles de management, grandes écoles, universités sont nombreuses à proposer un apprentissage de l’oralité : concours d’éloquence, cours de prise de parole, coaching ou mentorat pour s’affirmer dans une réunion ou négocier, organisation de conférence de type « TEDX »… L’aisance à l’oral, avec l’accent mis sur les soft skills, devient une compétence de plus en plus prisée dans le monde professionnel. Mais elle est source de discriminations sociales et de genre, c’est pourquoi de nombreuses initiatives s’adressent aux femmes.
Eric Cobast, professeur, est aussi le directeur de la toute nouvelle « académie de l’éloquence » d’Inseec U, un groupe privé rassemblant plusieurs écoles. Les femmes, étudiantes ou cadres, constituent la majorité de ses élèves. « Elles viennent chercher de l’assurance et veulent sans doute rétablir de l’égalité dans l’échange », explique-t-il.
Anne-Lucie Wack, présidente de la Conférence des grandes écoles (CGE), rappelle la brillante réussite des étudiantes des grandes écoles et les inégalités qu’elles rencontrent ensuite à leur entrée sur le marché du travail (accès au CDI, salaire moindre que leurs confrères…). Si l’aisance orale n’est pas le seul facteur expliquant cette situation, elle joue néanmoins un rôle selon Béatrice Duboisset, fondatrice du TEDx ChampsElyséesWomen : « l’aisance à l’oral ne sert pas simplement à prendre la parole en public. Cette compétence se révèle utile pour manager une équipe, défendre des idées, argumenter face à un client. Pour aider les femmes à briser le plafond de verre, il faut travailler sur les facteurs qui conditionnent leur confiance ».
D’ailleurs, selon Viviane de Beaufort, fondatrice des Women Essec Executive Programs, « dans des équipes plus féminines, [la difficulté pour une femme de prendre la parole] a tendance à disparaître ».
Certaines formations à l’oralité sont réservées aux femmes, d’autres sont ouvertes à tous. Hélène Périvier, directrice d’un programme de recherche sur le genre à Science Po estime pour sa part que « plutôt que de former des femmes pour qu’elles ressemblent à des hommes, il faut changer les codes professionnels pour les rendre plus inclusifs. Pour ce faire, nous devons préparer nos futures élites, femmes comme hommes, à une meilleure compréhension de ces mécanismes de discrimination ». Elle vient de lancer un certificat « égalité femmes-hommes et politiques publiques » qu’elle codirige avec Najet Vallaud-Belkacem, l’ancienne ministre des Droits des femmes.
A noter, Audencia Business School a mis en place un atelier gratuit de « negotraining ». Réservé aux femmes de la métropole nantaise, il leur permet, pendant 3 heures, de travailler l’argumentaire et le pitch à travers des jeux de rôle. L’objectif : être plus percutante, plus convaincante, plus sûr de soi dans son discours. Depuis septembre 2017, 1 000 professionnelles, surtout des cadres, en ont bénéficié. Et ça marche ! 6 mois après avoir suivi ce négotraining, une femme sur 2 a renégocié sa rémunération. Seule 1 sur 10 n’a rien obtenu.