IA. Nouvel enjeu des PME
L’intelligence artificielle (IA) et ses nombreuses applications (optimiser un flux logistique, contrôler la qualité d’une chaîne de production, prévenir une panne…) restent méconnues dans la plupart des PME. Selon Sylvain Duranton, directeur monde de la société de conseil BCG Gamma, « moins de 15 % des entreprises françaises ont des solutions IA qui tournent, et ce taux est encore plus faible dans les PME ».
Pour Laure de la Raudière, députée d’Eure-et-Loire et spécialiste du dossier, « si les PME industrielles n’ont pas intégré rapidement le numérique, la blockchain et l’IA, elles risquent de se faire dépasser ». Selon elle, « dans nos territoires, il vaut mieux miser sur la numérisation et le passage à l’IA, plutôt que de créer des pépinières à start-up qui sont un phénomène métropolitain ».
Pourquoi les PME ne franchissent-elles pas le pas ? Parce qu’elles méconnaissent les enjeux et les ressources à mobiliser (personnel formé, données de qualité…). Seuls 20 % des dirigeants de PME pensent « que l’IA doit être une priorité ». Par ailleurs, les salariés redoutent de se faire remplacer ou d’être dépassés par une machine. Autres freins : l’acculturation et l’investissement financier. Pour lever ces derniers, Bpifrance a déjà audité une centaine d’entreprises dans le cadre de la prestation « Diagdata ». Son objectif : « convaincre les PME, en particulier industrielles, que l’IA est un outil parmi d’autres pour la numérisation de leur outil productif ».
Marc Damez-Fontaine, directeur Data Analytics chez PwC indique que des « grosses PME industrielles commencent à s’y intéresser, par exemple dans le domaine de la papeterie. Certaines applications comme la mesure de la qualité d’un produit, la détection ou la prévention d’une panne leur sont accessibles. En revanche, la « machine autonome » qui répare elle-même sa panne suppose un niveau de technologie d’IA auquel les PME n’ont pas accès aujourd’hui ».
Si jusqu’à présent ces dernières demeuraient dans l’angle mort des politiques publiques orientées vers l’IA, ce n’est plus le cas. L’Union européenne a lancé l’an dernier un plan en faveur de cette technologie. Et Bercy souhaite rapidement améliorer le taux de pénétration de l’IA dans les PME via un plan de numérisation, des conseils et audits auprès de 10 000 petites entreprises. En parallèle, le ministère de l’Économie lance un « Challenge IA » pour mettre en relation PME et start-up porteuses de solutions. Certaines régions, comme l’Ile-de-France, proposent un plan « IA » avec un dispositif personnalisé d’accompagnement des PME. Les pôles de compétitivité seront aussi des acteurs mobilisés.
Les PME saisiront-elles toutes ces possibilités d’accompagnement ? Thomas Courbe, directeur de la Direction générale des entreprises (DGE) rappelle que toutes ces actions ont pour but de montrer aux PME « […] que l’IA peut aussi être modeste, que ce n’est pas forcément une rupture, et qu’elle peut leur apporter des solutions efficaces mais frugales ! ». Par ailleurs, Jean-Christophe Gougeon de Bpifrance note que l’IA « contrairement à la révolution digitale, transforme le modèle de l’entreprise. L’objectif n’est pas uniquement d’améliorer la performance, mais de maîtriser sa data pour créer de la valeur ».